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Jacques Jean Sicard

Frag

ment

s

 

 

 

 

 

Sur la bande son, deux voix au téléphone, l'une féminine, l'autre masculine, parlent d'émoi, s'enlacent de ne connaître que leurs voix, jouissent d'avoir foi en leur seul imaginaire exalté par les sons différemment sexués. Cela pourrait durer des années. Cela durera des années.

Sur la bande image, deux mains anonymes maquillent tour à tour deux visages de femmes et un visage d'homme, le subtil allié au soin de l'apprêt cosmétique évoque le cuivre de la fête, les lampions du bal, l'électricité de la scène, la flamme du boudoir - le rendez-vous d'amour qui ne saurait attendre.

Il n'y aura cependant boudoir, scène ni fête. Insensiblement, le phrasé se substitue à la phrase tant les mots sont de musique et non de gorge. L'ébriété sensuelle due à la séparation comble au-delà de la promesse du rendez-vous. La matière est détruite par la forme. Et la gestuelle experte du patricien visagiste s'apparente à l'art mortuaire du thanatopracteur.

 

 

 

Note sur Le Navire Night de Marguerite Duras
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